Le transfert et le contre-transfert dans les cures d’enfants et d’adolescents.
Les apports des pionniers de la psychanalyse d’enfant vont être fondamentaux pour la théorisation de la dynamique transfert-contre-transfert.
R. Spitz, M. Mahler, M. Klein et D.W. Winnicott, vont mettre en éclairage le rôle primordial des qualités de l’objet primaire et des premières relations d’objet précoces pour l’organisation psychoaffective de l’enfant.
Mélanie Klein part de l’identification projective comme un mécanisme de défense primaire constitutif du développement de l’Infans, appartenant à la position schizo paranoïde, pour la compréhension du transfert chez l’enfant. (Klein, 1946). Elle soutient l’importance d’interpréter le transfert négatif et l’angoisse qui lui est liée.
Avec Bion (1950), l’identification projective constitue un mode primitif de communication. A partir de là, il développe la notion de « capacité de rêverie » ou « fonction alpha » de la mère qui transforme le vécu psychosomatique traumatique de l’Infans en expérience émotionnelle, langagière et en trace psychique. Il transpose son modèle de capacité de rêverie maternelle à la situation analytique, dans laquelle l’analyste doit pouvoir contenir et reconnaître l’identification projective, et ce qu’elle suscite en lui de ressentis sensoriels, émotionnels et d’affects, afin de les restituer au patient sous une forme assimilable. Bion insiste aussi sur la capacité négative de l’analyste « sans mémoire, sans désir, sans compréhension » expression empruntée au poète Keats définissant la capacité à tolérer l’inconnaissable qu’accompagne une attitude d’ouverture réceptrice.
D.W. Winnicott en 1947 avec la notion de la haine dans le contre-transfert souligne la nécessité chez l’analyste, dans sa réponse émotionnelle au transfert du patient, de devoir non seulement supporter que la haine lui soit attribuée mais aussi de la reconnaître comme sienne propre par rapport au transfert du patient. Il pointe l’importance chez les patients états-limites, de la sollicitation de l’analyste pour engager un processus centré sur la régression à la dépendance. La situation analytique, c’est-à-dire l’ensemble de tous les détails concernant la conduite de l’analyse est au premier plan par rapport au travail interprétatif.
Florence Guignard va approfondir cette théorisation du contre-transfert, à partir de la qualité et des particularités du transfert chez l’enfant qui est « à la fois intense, extrêmement polymorphe et son expression est souvent camouflée, notamment par des réactions phobiques » (Guignard) La difficulté contre-transférentielle y tient au fait que l’analyste est au cœur de trois générations : l’enfant, ses parents et grands-parents. Et l’analyste devient le réceptacle des objets internes de l’enfant mais aussi celui des objets internes de chacun des deux parents.
Florence Guignard part du concept de l’Infantile qui soulève la question des taches aveugles et des interprétations-bouchons. L’Infantile comme lieu d’impact et de communication avec un autre être humain ; en raison de la force pulsionnelle peu liée issue de l’Infantile du patient qui déclenche une excitation au niveau de l’Infantile du psychanalyste. Elle survient devant une rupture de contact dans la communication patient/analyste, traduisant un manque à représenter, ce que Guignard nomme « tâche aveugle » qui surgit aux confins de l’INCS et du PCS et peut faire l’objet « d’une communauté de déni » (Fain) « La tâche aveugle surgit dans le contre-transfert de l’analyste, toutes les fois qu’il se retrouve en identification projective avec l’un des objets internes du patient, ou parfois, avec une partie clivée ou déniée de son Moi. » (Guignard) Les taches aveugles sont inhérentes au travail analytique. L’important est de les repérer et d’en sortir. Les interprétations-bouchons qui servent à se prémunir des taches aveugles sont des interprétations « saturées » c’est-à-dire défensives pour éviter l’envahissement par l’angoisse. Elles peuvent contenir de façon plaquée des éléments de l’histoire personnelle du patient. Florence Guignard précise : « La sortie d’une tâche aveugle constitue la sortie de la fascination par le traumatisme. » (Guignard, 2015, p.231)
Michel Ody (2013) remplace l’association libre de la règle fondamentale applicable chez l’adulte par la notion d’associativité ou de fluidité associative chez l’enfant et l’adolescent. Lors des premiers entretiens avec un enfant ou un adolescent, il décrit la notion de représentations d’attente, de représentation-théorie du psychanalyste – à différencier d’une représentation-but qui serait fermée – qui est mise au travail au fur et à mesure que se déroule le processus psychanalytique dans la relation et la dynamique transféro-contre-transférentielle. Il envisage ce concept du côté de la précession du contre-transfert sur le transfert dans les cures d’enfant.
Lors du séminaire clinique nous interrogerons la dialectique transféro-contre-transférentielle au sein de situations cliniques en tentant de repérer le processus en cours et ses différents mouvements. Aussi, l’ajustement de l’objet, sa réponse émotionnelle, ses représentations d’attente, ses constructions d’attente, son infantile et ses théories sexuelles infantiles vont constituer une empreinte d’être, dans sa capacité à régresser, accompagner, s’identifier, s’effacer, souffrir, construire, jouer, résonner ou interpréter.
Textes
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- Guignard F, (2024), « L’Infantile et son rôle dans la conduite du travail analytique », Rencontre avec Florence Guignard, À l’écoute de la pensée humaine ; Entretien avec Sylvie Reignier, Toulouse, Érès, p ;153-165.
- Ody, M, (2013), Le psychanalyste et l’enfant, De la consultation à la cure psychanalytique, Paris, In Press, p ; 169-176.
- Klein, M, (1952), « Les origines du Transfert », Le transfert et autres écrits, Puf.
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Objectifs pédagogiques
Samedi 17 mai 2025
Séminaire théorique de 2 heures. De 13h30 à 15h30.
Être en mesure d’utiliser les apports théoriques liés à la dialectique transféro-contre-transférentielle lors de la mise en place de la cure.
Séminaire clinique de 2 heures. De 16h00 à 18h00
Repérer dans la clinique le processus transféro- contre- transférentiel, ses différents mouvements et leur impact.
Les « Samedis» de la Sepea sont ouverts aux psychothérapeutes qui le souhaitent, sous réserve d‘un entretien préalable avec un membre de la Sepea.
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